Pierre Athanase Larousse naît le 23 octobre 1817, à Toucy, dans l'Yonne, d'un père charron-forgeron et d'une mère aubergiste. Il passe une enfance heureuse, partagée entre l'école publique, la riche campagne de Puisaye et les livres. Des livres qu'il dévore au fur et à mesure que le hasard les fait passer entre ses mains. Tel Robinson Crusoé, qu'il lit le soir en cachette, à la chandelle : « Quand ce livre délicieux m'est tombé sous la main, pour la première fois, j'avais neuf ans, et pour le dévorer j'ai commis des bassesses : j'ai volé quatre chandelles à ma mère, et, circonstance aggravante, les chandelles étaient toutes neuves. » À dix-sept ans, il se présente au concours de l'école normale primaire de Versailles. Brillamment reçu, il bénéficie d'une bourse et y fait ses études jusqu'à l'obtention du brevet supérieur.
Pierre Larousse a vingt et un ans à peine. Il rejoint son Toucy natal pour y être instituteur. L'atmosphère de l'école est sévère et très pieuse. Le jeune homme, frais émoulu de Versailles, se heurte à des méthodes (abus du par cœur) et des manuels archaïques, des règlements tatillons, des châtiments corporels abusifs. Il enrage de ne pouvoir enseigner à sa guise. Deux ans plus tard, en 1840, il quitte la blouse et l'Yonne pour se consacrer à ce qui allait être sa vocation.
Toucy est la patrie de Pierre Larousse (1817-1875) ; il y passa une enfance
heureuse, partagée entre l'école publique, la riche campagne de la Puisaye et les livres.
Il y enseigna jusqu'en 1850, date à laquelle il partit pour Paris.
Avec de maigres économies en poche, Pierre Larousse part pour Paris, loue une mansarde au Quartier latin et suit tous les cours gratuits qu'il peut trouver : Sorbonne, Conservatoire des arts et métiers, Collège de France, Muséum d'histoire naturelle. Il bourre ses poches de notes, qu'il met au clair, le soir, dans les salles chauffées de la bibliothèque Sainte-Geneviève. Ces savantes études supérieures ne seront pourtant pas sanctionnées par des diplômes, car il ne passe ni examen ni concours. Ce qui lui vaudra longtemps une réputation d'autodidacte.
La maison natale de Pierre Larousse
De 1848 à 1851, Pierre Larousse est répétiteur à l'Institut Jauffret, un internat privé. L'écrivain Edmond About, qui fut alors son élève, le décrit ainsi : « C'était un petit homme trapu, à barbe fauve, aux yeux pétillants, un piocheur renfermé, ténébreux, fortement soupçonné de couver des idées subversives. Ce pion rêvait de publier un dictionnaire comme on n'en avait vu, une encyclopédie populaire. » C'est à cette époque qu'il rencontre celle qui sera sa compagne : Suzanne Caubel. Jugeant le mariage une institution conformiste, il ne se mariera qu'en 1872, trois ans avant sa mort. Ils n'auront pas d'enfant. Suzanne relit, corrige, complète ce qui sera le premier ouvrage de Pierre : la Lexicologie des écoles primaires, cours complet de langue française, destiné à apprendre aux enfants non seulement l'orthographe, mais aussi l'art de parler et d'écrire correctement. Ce livre paraît, à compte d'auteur, en 1849.
En 1851, une rencontre capitale pour Pierre Larousse : celle d'Augustin Boyer, compatriote, puisque né à Villiers-saint-Benoît, à quelques kilomètres de Toucy, encore un instituteur ayant quitté l'enseignement et qui cherche sa voie dans le commerce. Les deux hommes se lient d'amitié, s'associent et fondent en 1852 la Librairie Larousse et Boyer. À partir de ce moment, la production de Pierre Larousse devient considérable. Ses innombrables publications pédagogiques connaîtront un succès prodigieux. S'appuyant sur des principes pédagogiques modernes, il renouvelle de fond en comble l'enseignement du français, s'efforçant d'éduquer de façon active l'intelligence et le jugement des enfants, en meublant de façon attrayante leur esprit. Dans le journal destiné aux instituteurs et aux professeurs, l'École normale, qu'il crée en 1858, il se révèle un vigoureux polémiste, défendant notamment les principes de la gratuité et de l'obligation de l'enseignement primaire.
C'est en 1856 que paraît le Nouveau Dictionnaire de la langue française, l'ancêtre du Petit Larousse, avec ses deux parties déjà séparées par les « pages roses » ; il a un succès immédiat. Mais Pierre Larousse a depuis longtemps en tête un autre projet, celui d'une encyclopédie qu'il voudrait semblable à celle de Diderot et d'Alembert, un livre, dit-il, « où l'on trouvera, chacune à son ordre alphabétique, toutes les connaissances qui enrichissent aujourd'hui l'esprit humain », et qui s'adressera non pas à une élite, mais à tous, de façon à « instruire tout le monde sur toutes choses ». Ce projet se concrétise le 27 décembre 1863 avec la parution du premier fascicule du Grand Dictionnaire universel du XIXe s.. Le 19 avril 1863, Pierre Larousse annonce : « Cet ouvrage paraîtra par fascicules de 200 pages ; en tout 15 fascicules à 5 F chacun ; 75 F l'ouvrage complet. Une remise de 15 F est accordée aux mille premiers souscripteurs. En outre, ils recevront immédiatement, à titre de prime, un exemplaire de la Flore latine ou des Fleurs historiques à leur choix. » En mai, il revient sur sa décision : le prix du dictionnaire est de 80 F, car la somme précédente « payait à peine les frais de papier et de composition, le tirage fût-il de 10 000 exemplaires ».
Pierre Larousse est tout entier présent dans cette œuvre savoureuse et gigantesque qu'est le Grand Dictionnaire universel du XIXe s., monument à la gloire des idées républicaines, libérales, laïques et progressistes. Convaincu que l'engagement ne nuit en rien à la qualité de l'information, Pierre Larousse est un auteur qui emploie le « je » ou le « nous » en toute liberté, souvent avec virulence. Original et non conformiste, polémique, partial et partisan, homme de progrès, épris de justice et de liberté, il empoigne son lecteur dans les articles du dictionnaire, conte des anecdotes, s'amuse, s'indigne, cite, répète, explique et toujours ... enseigne. Il a sinon tout écrit, du moins tout conçu, relu, corrigé, contrôlé. Il est entouré d'une armée de collaborateurs qu'il paie à la ligne et auxquels il fait rédiger des fiches de synthèse. Il surveille de près leur travail, afin d'assurer à l'ensemble de l'ouvrage une homogénéité complète. Certains de ces collaborateurs, peu connus alors, le deviendront par la suite. D'autres le sont déjà, il leur commande des articles : Alfred Deberle, Louis Combes, Anatole France.
En 1869, Augustin Boyer se sépare de Pierre Larousse. Les ouvrages scolaires et le dictionnaire vont être diffusés par la maison Boyer, laquelle fait imprimer par Larousse ses propres ouvrages. En 1868, Pierre Larousse avait été victime d'une première attaque cérébrale, sans gravité, mais révélant un épuisement dû à l'énormité de la tâche. En 1871, il est atteint de paralysie. Il s'éteint le 3 janvier 1875, à l'âge de 57 ans, sans avoir pu voir la fin de son œuvre (elle en était au tome XII). C'est son neveu, Jules Hollier-Larousse, qui terminera ce monumental dictionnaire encyclopédique, la pierre sur laquelle les Éditions Larousse se sont élevées, à l'origine d'un fonds dictionnairique et encyclopédique inégalé.
(D'après : André Rétif, Pierre Larousse et son œuvre, Larousse, Paris, 1975.)
Le Dîner de Pantalon ou le Plat d'oreilles (l'École normale, V, 162). Les Quatre Prunes (E. N., IV, 13, et brochure). L'Avocat Patelin (E. N., VI, 305, et brochure). Le Grondeur (E. N., XIII, 145, et brochure). Taquinet ou le Panier de figues (G. D., s. v. collège). (Avec A. Deberle) Salsifis ou les Inconvénients de la grandeur (E. N., III, 185).